S’infiltrer dans une des villes de la planète Taron était loin d’être une tâche facile. Dès leur arrivée, le groupe avait constaté une forte occupation militaire, des centaines de soldats patrouillant dans les rues. Ils étaient tous armés d’une épée et d’une sorte de pistolet-mitrailleur qui projetait des pulsations énergétiques, un type d’arme relativement répandu dans les planètes de la confédération. Ils étaient tous vêtus d’une armure aux teintes rouges, portant fièrement les couleurs de l’armée de Hajnal.
Les civils se promenaient dans les rues, la tête baissée, en demeurant silencieux, pour ne pas attirer l’attention sur eux. Mais à maintes reprises, certains d’entre eux se faisaient interpeller par les soldats qui les forçaient à s’identifier ainsi qu’à dire où ils se dirigeaient. Malheur à celui qui s’opposait, car il était arrêté sur-le-champ, souvent après avoir été roué de coups.
« C’est… pire que quand je suis partie… » dit Sora tout bas, se cachant dans le manteau de Komotheit. Quand elle était encore prisonnière sur Taron, les troupes de Hajnal avaient une certaine présence, mais aujourd’hui, ils surveillaient minutieusement les allées et venues dans les villes.
« Ils ont instauré une loi martiale pour pouvoir diriger. » conclut Komotheit.
« Bande de salauds… il faut trouver le moyen d’arrêter tout ça! » s’exclama Emi.
« Oui… mais les affronter directement ne ferait qu’empirer les choses. Aussi, il ne faut pas mettre Sora en péril. » raisonna Mejin.
« Mejin a raison. » répondit le crystaliste. « La meilleure chose à faire est d’acquérir le plus d’informations possible sur notre ennemi pour trouver le moyen le plus efficace de les vaincre sans toutefois risquer la vie des gens de cette planète. »
« Hé!! Vous!! » cria un des soldats.
« Merde. »
Alors que trois des soldats de Hajnal commencèrent à s’approcher du groupe, Komotheit se mit dos au mur d’un édifice, Sora étant toujours cachée dans son manteau. Elle prit donc cette opportunité pour s’appuyer contre le mur, se servant de ses pouvoirs pour s’y camoufler en devenant invisible.
« C’est la première fois que je vous vois ici. Identifiez-vous. » dit le soldat.
« Nous n’avons pas encore nos pièces d’identité. » répondit Komotheit. « Excusez-nous, mais cela ne fait pas longtemps que nous sommes arrivés sur Taron. »
« Comment avez-vous fait pour entrer en ville alors? » questionna l’autre soldat.
« Et merde. » pensa le crystaliste alors qu’ils braquèrent leurs armes sur le trio terrien.
« Suivez-nous. Vous êtes en état d’arrestation. »
« Vous faites une grave erreur… » dit Komotheit, mettant l’une de ses mains derrière son dos en s’avançant vers les militaires. Emi et Mejin firent un pas en arrière alors que l’homme de l’espace invoquait Shade, voulant les éliminer le plus rapidement possible.
Toutefois, l’attention de Komotheit ainsi que celle des soldats fut attirée par un puissant son aigu provenant du bout de la rue. C’est alors qu’ils virent s’approcher une paire d’étranges véhicules qui ressemblaient énormément à des motos. Ils fonçaient sur eux à une vitesse fulgurante, laissant derrière un brillant trait de lumière le long de leur trajectoire. Étonnamment, ils se déplaçaient tout en lévitant à quelques centimètres du sol, semblant glisser sur une fine couche d’air.
Les cavaliers de ces montures de métal semblaient être des adolescents, portant tous des vêtements endommagés, ainsi que des casques qui ne laissaient pas voir leurs visages. L’un d’entre eux tenait une bombe artisanale, l’activant en appuyant sur son détonateur. Les rebelles foncèrent sur le groupe de soldats en poussant leur cri de guerre, qui était similaire au hurlement d’un loup.
« Attention!! » cria l’un des militaires.
Mais le jeune guerrier balança son explosif avant qu’ils puissent réagir. L’explosion engloutit les soldats alors que Komotheit prit Mejin par la taille pour bondir avec Emi loin de la boule de feu, le traînant jusqu’à la ruelle la plus proche. Sora était déjà là, toujours dissimulée par son pouvoir d’invisibilité.
« M-Merci, K-Komotheit!! » souffla Mejin, encore sur le choc.
« On dirait que nous ne sommes pas les seuls à vouloir la peau de Hajnal. » conclut Emi.
« Montons sur le toit. » dit Komotheit. « Nous serons plus en sécurité si nous restons loin des rues, en plus de pouvoir observer le tout. »
Le groupe s’exécuta, grimpant les escaliers de l’immeuble qui était tout près. Sur le toit, ils s’accroupirent le long de la bordure, pour éviter que les troupes de Hajnal ne les repèrent. La chance était avec eux, car l’édifice sur lequel ils se trouvaient était quand même dominant dans la ville, ce qui leur permettait d’avoir une excellente vue sur l’affrontement qui se déroulait au sol.
Les soldats de Hajnal tentaient de se préparer le plus rapidement possible à riposter, mais la nature soudaine de l’attaque avait donné à l’ennemi l’avantage de l’effet de surprise. Ils choisissaient les escouades à attaquer de façon aléatoire, rendant impossible de mettre au point une stratégie de défense efficace. Tout ce que les troupes pouvaient faire était de mitrailler les assaillants avec leurs armes, créant une pluie de lumières dans les rues.
Cela n’impressionna aucunement le gang, car leurs véhicules se déplaçaient beaucoup trop vite pour que les soldats puissent les mirer efficacement. Les membres de la bande n’étaient toutefois équipés que d’armes rudimentaires comprenant des chaînes, des pieds-de-biche, des bombes artisanales et autres.
Leur stratégie était principalement d’envoyer des équipes de deux dans le but d’attirer l’attention de l’ennemi vers eux. Une fois la diversion faite, un autre groupe fonçait sur eux pour les attaquer par-derrière, tentant de les frapper avec ce qu’ils avaient sous la main, visant typiquement la tête. Peut-être avaient-ils un arsenal primitif, mais ils causaient des dégâts pratiquement fatals lorsque leur force de frappe était jumelée avec la vitesse de leurs véhicules.
« Je n’ai jamais vu une telle sauvagerie… » nota Mejin.
« Typique d’une guérilla. » répondit Komotheit.
« Guérilla?… » demanda Emi.
« Une guerre faite par un groupe clandestin qui implique souvent des attaques soudaines comme celles-ci. C’est un moyen efficace d’affronter une armée telle que Hajnal quand les ressources humaines et militaires sont limitées. »
« Mais comme ça… ils peuvent accidentellement tuer des innocents! » répliqua Mejin.
« Je sais. Mais pour qu’ils se mobilisent ainsi, ils ont jugé qu’il n’y avait pas d’autres choix, croyant que cette barbarie était nécessaire. »
Pendant ce temps, une paire de rebelles décidèrent de foncer sur une autre escouade de Hajnal. Le premier frappa l’un des soldats avec sa chaîne, l’assommant. L’autre le suivit et tenta de frapper le dernier soldat avec une clé anglaise, mais rata sa cible. Tentant sa chance puisque l’adolescent était encore près, le militaire ouvrit le feu sur lui, les projectiles lumineux touchant son véhicule. Le moteur explosa et le rebelle dérapa en tombant, la paroi de son engin frappant sa jambe au passage.
« Quelqu’un a besoin d’aide!! » s’exclama Emi, témoin de ce qui venait de se passer.
« N’y va pas!! » contesta Komotheit. « C’est un vrai carnage en bas, tu vas te faire tuer!! »
« Argh!! Essaie de m’en empêcher!! » hurla la jeune demoiselle en sautant du bord de l’immeuble. Komotheit courut vers elle pour tenter de l’agripper au collet, mais en vain. Elle était déjà en bas à parcourir à toute vitesse les ruelles pour aller rejoindre le jeune guerrier en détresse.
« Merde… Elle est enrageante quand elle veut!! »
« Que faisons-nous? » demanda le moine.
« Sora, tu deviens invisible. Mejin, tu restes avec elle et tu la protèges. Moi, je vais aller chercher Emi. »
Pendant ce temps, l’adolescent reprenait peu à peu ses esprits. Il s’était frappé la tête contre le sol, mais le casque qu’il portait lui avait sauvé la vie. Toutefois, en tentant de se relever, il ressentit une grande douleur à jambe droite. L’os n’était pas cassé, mais il ne pouvait pas s’enfuir des soldats qui s’approchaient de lui.
« Tu vas tout nous dire à propos de ta bande si tu ne veux pas qu’on te tue. » dit l’un d’entre eux, ne recevant toutefois aucune réponse de la part du jeune.
« Oh, ne t’inquiète pas. On a les moyens de te faire parler, petit salaud. » dit un autre.
C’est à ce moment que la jeune demoiselle aux cheveux de feu arriva par les airs, atterrissant au milieu du groupe de soldats.
« SPIRIT FIELD!!! »
Elle étira immédiatement les bras, créant un puissant champ de force lumineux qui foudroya des troupes de Hajnal, les plaquant au sol avant qu’ils n’aient pu constater sa présence. Ils s’étaient tous évanouis, gisant sur le sol.
« Est-ce que ça va? » demanda Emi, tendant sa main vers le rebelle. « Viens avec moi, nous devons partir au plus vite avant que d’autres arrivent! »
Le jeune guerrier rampa vers l’arrière, touchant son casque pour s’assurer que la visière qui dissimulait son identité n’était pas cassée. Il poussa un long hurlement, ressemblant encore une fois à celui d’un loup. Un autre membre de la bande répondit au signal et s’approcha de lui avec son véhicule étincelant. Il tendit la main et attrapa son camarade blessé au passage, le faisant sauter sur le siège arrière avant de déguerpir. Le rebelle qu’Emi avait sauvé la regarda une dernière fois avant de tourner le coin de la rue, disparaissant.
« Te voilà!! » s’écria Komotheit en arrivant.
« Komo! » répondit Emi.
« Ne me fais plus jamais ce coup-là!! » hurla le crystaliste. « Bordel, pourquoi penses-tu que je ne voulais pas que tu me suives au début?! Tu es toujours en train de sauter tête première dans des situations suicidaires!! »
Emi ne répondit pas, baissant la tête. Malgré que c’était toujours bien intentionné, Komotheit avait raison à son sujet. Encore une fois, elle se sentit comme un fardeau pour lui. L’homme de l’espace perçut son sentiment de culpabilité et décida de baisser le ton.
« Emi… » dit-il. « C’est juste que… tu me fais peur quand tu fais des choses comme ça. »
« V… Vraiment? » demanda Emi en relevant la tête, les larmes aux yeux.
« Euh!! » répondit Komotheit, se retournant pour éviter qu’elle le voit rougir. « B-Bien sûr! Je m’inquiète pour toi et je ne veux pas qu’il t’arrive quoi que ce soit. »
« M…Merci… » dit Emi en souriant enfin. « Je ne croyais pas que… »
Emi s’arrêta de parler aussitôt, semblant foudroyée par quelque chose. Son cœur s’accéléra ainsi que le rythme de sa respiration et ses mains commencèrent à trembler considérablement. Elle sentit la faiblesse commencer à s’emparer d’elle. Comment cela pouvait-il être possible? La seule chose qu’elle avait faite était de mettre quelques soldats hors d’état de nuire.
« Emi? Ça va? » demanda Komotheit.
« Euh… Oui, ça va! » répondit-elle, lui cachant son état. « Allons rejoindre Mejin et Sora au plus vite. »
« Bonne idée. Toutes les forces de Hajnal se sont rassemblées dans un quartier particulier pour préparer une contre-attaque, alors il n’y a plus de patrouilles dans une grande partie de la ville. C’est notre opportunité de trouver un endroit pour se réfugier. »
« D’accord, dépêchons-nous!! »