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61 – Le constat de Farkas

« Qu’avez-vous pris les gars pour me sortir des conneries comme ça? »

« C’est la pure vérité!! Elle a fait un simple saut et c’est comme si elle s’envolait!! »

 

Après être sortie de la salle où s’était déroulée la réunion, Farkas fût interceptée par les deux adolescents qui voulaient lui parler en urgence plus tôt. Après avoir entendu comment Emi avait sauté d’un immeuble à l’autre d’une vitesse phénoménale jusqu’au lieu de l’accident, Farkas ne pouvait pas en croire ses oreilles. Normalement, elle les aurait envoyés hors de sa vue, mais ils semblaient à jeun et très sérieux.

« Écoute, Farkas… » dit l’un des rebelles. « Ça fait deux ans qu’on se bat sans cesse! Nos frères et sœurs meurent chaque jour… Par contre, nous avons des alliés qui peuvent mettre fin à tout ça!! »

« Mettre… fin… » dit Farkas tout bas, se remémorant le moment où elle a rencontré le groupe terrien plus tôt dans la soirée.

« Tu veux les anéantir? Qu’est-ce qui te fait croire que tu feras le poids contre eux? »

« Hé!! Je te ferai savoir que tu parles à l’un des êtres les plus puissants de l’univers!! Si quelqu’un en est capable, c’est bien lui!! »

 

Tout à coup, la chef rebelle se retourna et marcha d’un pas rapide, suivie des deux rebelles, vers le dortoir où étaient logés Emi, Mejin et Sora. L’histoire était complètement farfelue, mais elle savait que si elle était vraie, c’était peut-être sa seule chance de réduire Hajnal en poussière pour venger l’amour de sa vie. Lorsqu’elle arriva au dortoir, elle s’arrêta près de la porte, pouvant entendre une conversation entre la Gardienne de la Terre et le moine alors que Sora dormait profondément.

« Mais, Mejin! Il a presque tout foutu en l’air!! » s’exclama Emi.

« J’avoue que tu as raison, mais je comprends aussi le raisonnement de Komotheit. Je suis sûr que tu as fait le lien entre Sora et cette source d’énergie qu’ils ont détectée sur la lune de cette planète. »

« C’est évident qu’elle EST cette énergie. Par contre, en quoi cela a-t-il rapport à Dorjan qui se crée une armée pour régner sur Rhan-Kahal? Sora n’est pas assez puissante pour que ce dérangé puisse imposer de force sa volonté sur le système solaire en utilisant son pouvoir… »

« C’est parce que le rôle de Sora est tout autre, Emi. Entre la découverte de Sora par Dorjan et son adhésion aux forces de l’ordre pour construire sa puissance militaire, il a fait des recherches sur la mythologie. Rappelle-toi ce que Komotheit a dit sur elle… elle est la clé qui mène à un grand pouvoir. »

« Un grand pouvoir… Non!! Tu veux dire qu’il veut se servir de Sora pour devenir une sorte de dieu?! »

« Exactement. »

 

En entendant cela, Farkas figea sur place, sa respiration s’accélérant. Pour la première fois, la peur sembla l’envahir complètement, étant foudroyée maintenant par l’horrible vérité que ce combat n’était pas de son calibre. Serrant les poings, elle pouvait entendre de nouveau l’avertissement que Komotheit lui avait lancé.

« Dorjan a en sa possession un pouvoir que tu ne peux même pas commencer à comprendre!! Si tu l’affrontes, il t’exterminera sans le moindre effort et ce sera alors la fin pour Taron!! »

« Entre, Farkas. Je sais que tu nous écoutes. » dit le moine.

 

La chef de la meute entra alors dans le dortoir, la tête baissée. Après un moment d’hésitation, elle regarda le groupe terrien d’un air embarrassé.

« On dirait… que je vais seulement vous encombrer après tout… »

« Non!! » s’insurgea Emi. « Ne dis pas de conneries, Farkas!! Taron et tous ses habitants ont besoin de toi et de la meute plus que jamais!! »

« Votre ami a dit que… »

« Laisse faire ce que cette tête de mule a dit. S’il n’en faisait qu’à sa tête, il essaierait d’éliminer tous les soldats de Hajnal et tuer Dorjan tout seul. »

« Elle a raison. » continua Mejin. « Les enjeux sont beaucoup plus grands que ce que vous imaginez, certes, mais cela ne fait qu’accentuer l’importance de votre rôle dans cette guerre. »

« Mais… » déplora la rebelle. « Je… ne pourrai jamais venger… mon amour… »

« Sans doute, et j’en suis terriblement désolé… mais la vengeance est-elle nécessairement la solution? Le lieutenant Jaren est mort en protégeant le bien-être des gens de ce système, y compris le vôtre. Peut-être que vous ne le réalisez pas encore, mais en fondant la meute, vous avez pris le flambeau qu’il a conséquemment laissé. À la place de continuer cette quête de représailles, pourquoi ne pas vous battre, toi et la meute, en poursuivant ce que ton défunt bien-aimé voulait accomplir? »

 

Tout ce que Farkas fit en guise de réponse fut de baisser la tête, murmurant le nom de son amoureux. C’est alors que seule Emi vit une figure lumineuse se tracer derrière la jeune rebelle. Les bras de l’homme éthéré l’enlacèrent et il sembla ensuite déposer un doux baiser sur la nuque de Farkas.

« Je suis avec toi… » dit-il, même si elle ne pouvait l’entendre. Cependant, elle commença à sourire, ressentant un peu la présence de son âme près de la sienne.

« S’il était toujours là… » souffla Farkas. « Il prendrait d’assaut Hajnal pour libérer Taron et le reste de Rhan-Kahal. Jusqu’à maintenant, je me battais pour les mauvaises raisons, mais avec votre aide, nous allons terminer ensemble ce qu’il a commencé! »

« En toi, je vois l’espoir de Taron rayonner de nouveau. » dit Mejin. « Alors, qu’allons-nous faire concernant Komotheit? »

« Je vais aller le voir et le raisonner de force. » dit Emi, alors qu’elle quittait le dortoir.

 

Elle sourit à l’esprit de Jaren, qui hocha la tête en retour. Farkas resta perplexe devant son geste tandis que Mejin fit un soupir nostalgique, se souvenant de l’époque où il voyait Alex communiquer avec les esprits que seul lui pouvait voir.

 

Pendant ce temps, Komotheit était assis sur le toit de l’entrepôt, la tête posée sur ses genoux relevés, qu’il serrait entre ses bras. Il respirait de manière rapide et saccadée, tourmenté à la fois par la voix qu’il ne pouvait noyer avec de l’alcool et la puissante douleur venant de sa mystérieuse plaie.

 

D’un bond, Emi le rejoignit sur le toit et fut saisie par une terrible sensation de froid à l’intérieur d’elle. Avec son pouvoir de perception spirituelle, elle pouvait voir à nouveau la blessure ténébreuse qu’elle avait aperçue sur son dos quand Komotheit se battait sur Terre contre Agata. La plaie qui émettait une mystérieuse fumée noire était logée sur son âme, ce qui expliquait pourquoi personne ne pouvait la voir sauf elle.

« K…Komo? » dit-elle doucement, pour attirer son attention.

« Ne t’approche pas de moi!! » hurla Komotheit d’un ton terrifié.

 

Emi sentit sa poitrine se serrer, prise entre le sentiment de peur que son aura sombre dégageait et le chagrin qu’elle ressentait en le voyant ainsi. Peu à peu, elle décida de s’approcher de lui, sans faire de gestes brusques pour ne pas l’alarmer.

« Non Emi!! » supplia Komotheit. « Reste… loin de moi… »

 

C’est alors qu’elle posa sa main sur son épaule, son contact envoyant une vague de chaleur apaisante à l’intérieur de lui. Lentement, la marque noire disparut, libérant Komotheit de l’emprise que la douleur avait sur lui. Emi s’assit ensuite tout près de lui alors qu’il levait la tête pour la regarder, ses yeux à nouveau bleus.

« Même si tu ne le montres pas… » dit-elle. « Je sais que tu souffres énormément, et ce, depuis longtemps… Tu ne peux pas t’imaginer la torture que cela me fait subir de te voir agoniser en silence… S’il y a quelque chose que je peux faire pour t’aider, n’importe quoi… je le ferai… »

« Emi… » répondit-il tout bas. « J’ai peur qu’un jour… par ma faute, il t’arrive quelque chose de terrible… J’ai peur de te faire mal… »

« Le Komotheit que je connais ne me ferait jamais de mal… » dit-elle doucement. « C’est pour ça que je lui ai promis que jamais je ne l’abandonnerais. »

 

L’homme de l’espace ferma les yeux et inclina la tête pour la déposer sur l’épaule de la gardienne. Bien qu’il avait peur que la terrible chose à l’intérieur de lui s’éveille et s’en prenne à Emi, elle était la première personne à soulager l’horrible solitude qu’il vivait depuis si longtemps. Morgan avait peut-être raison quand il a dit qu’il ne l’avait pas rencontrée sans raison.